Durant 2 hivers, deux lots de vaches Prim'Holstein ont été comparés à la station expérimentale de Trévarez : un lot témoin recevant la ration « classique » de Trévarez avec de l’ensilage de maïs (EM) à volonté, 4 kg de MS d’ensilage d’herbe (EH) et du tourteau de colza pour corriger la ration de base à 95 g de PDI/UFL ; et un lot recevant une ration plus autonome (lot expérimental ou ABCD) comprenant de l’ensilage d’herbe à volonté et 5 kg MS d’ensilage de maïs épi (EME). Le correcteur azoté (tourteau de colza) y était apporté à hauteur de 1 kg de MS/VL/j.
Durant les 3 mois d’essai, dans le lot ABCD, une forte baisse d’ingestion et donc de production laitière a été constatée, ainsi qu’une baisse du TP. Cette ration n’a pas permis de réduire les émissions de méthane.
Malgré une réduction du coût alimentaire, la perte de lait importante entraine une baisse de 12 000€ de la marge sur coût alimentaire pour un troupeau de 75 VL et une durée de 3 mois d’utilisation de la ration ABCD.
Pendant 2 hivers (2021-2022 et 2022-2023), l’impact de l’utilisation d’une ration plus autonome a été évalué sur le troupeau conventionnel de la station de Trévarez. Le lot expérimental ou ABCD a reçu une ration comprenant de l’ensilage d’herbe à volonté et 5 kg MS d’ensilage de maïs épi. Le correcteur azoté (tourteau de colza) était apporté à hauteur de 1 kg de MS/VL/j. Le lot Témoin a reçu la ration hivernale « classique » de Trévarez avec de l’ensilage de maïs à volonté, 4 kg de MS d’ensilage d’herbe et 4 kg de tourteau de colza pour corriger la ration de base à 95 g de PDI/UFL. Les rejets de CH4 ont été mesurés à l’aide de Green Feed.
La ration mélangée composée d’ensilage d’herbe coupe fine offert à volonté et de 5 kg MS d’ensilage de maïs épi a été beaucoup moins bien consommée que la ration Témoin (cf tableau 1) : l’ingestion totale de fourrages a diminué de 1,2 kg MS/VL/j et l’ingestion totale de 4,2 kg MS/vl/j. La ration ABCD est plus autonome avec seulement 0,9 kg MS de colza/VL/j. Mais son ingestion est pénalisée par le fort taux d’ensilage d’herbe, malgré la teneur correcte en matière sèche de ce dernier (32%).
La baisse d’ingestion observée dans le lot ABCD a entraîné une forte réduction de la production laitière -7,0 kg/VL/j, (cf tableau 2) et du TP (-1,5 g/kg), sans effet sur le TB. L’effet sur le lait a été statistiquement plus marqué pour les multipares (-7,8 kg/vl/j) que pour les primipares (-5,1 kg/vl/j).
Le produit lait du lot ABCD a été réduit de 2,8 €/VL/j du fait de la baisse de lait et de TP (tableau 3). Grâce à la réduction de la distribution de colza, le coût alimentaire du lot ABCD est plus faible de 1 €/VL/j que celui du lot témoin mais cette économie ne compense pas la forte baisse des livraisons : ainsi, la marge sur coût alimentaire du lot ABCD, plus autonome, est réduite de 1,8 €/VL/j : ceci représente une perte de près de 12.000 € pour un troupeau de 75 VL qui recevrait la ration ABCD pendant 3 mois.
Par ailleurs, la ration ABCD n’a pas permis de réduire les émissions de CH4 du troupeau. L’empreinte Carbone peut même être accrue si on choisit d’augmenter les effectifs de VL pour compenser la baisse de production laitière
(Hypothèses de coûts retenues €/t MS (données Trévarez 2019/23) : EM 41, EME 68, EH 51 51. tourteau Colza 355 €/t brute. Lait 348,5 €/1.000 l, g TP 6,6 €.)
Le choix d’une ration EH+EME entraîne une modification importante du système fourrager pour fournir toute l’année une ration basée sur l’herbe, pâturée et stockée. Par ailleurs, la surface en maïs doit être revue afin de produire les stocks de maïs épi recherchés : se baser sur un rendement en EME correspondant à 60% de celui de l’EM classique.
L’essai réalisé à la station de Trévarez a montré que l’on pouvait réduire l’apport de correcteur azoté dans les rations VL en réalisant une ration basée sur de l’ensilage d’herbe précoce et de 5 kg MS d’ensilage de maïs épi : cette ration permet de réduire fortement le coût alimentaire et la dépendance aux intrants. Le lait produit atteint en moyenne 21 kg / VL / j.
Toutefois, cette ration est beaucoup moins bien consommée par les vaches qu’une ration classique à base d’ensilage de maïs + 4 kg MS d’ensilage d’herbe. La forte chute de production laitière et de TP qu’elle entraîne dégrade fortement le revenu.
Le combo ensilage d'herbe et maïs épi pour développer l'autonomie protéique
La ration à base d'ensilage d'herbe et de maïs épi améliore l'autonomie protéique, réduit le coût alimentaire mais diminue la production laitière avec un impact carbone identique.
L’utilisation de maïs épi dans la ration hivernale des vaches laitières en complément d’ensilage d’herbe nécessite que l’EH soit de très bonne qualité. C’est un point qui peut être compliqué à obtenir car les volumes à récolter pour nourrir un troupeau durant l’hiver sont importants. Par exemple pour un troupeau de 75VL c’est 100 TMS d’EH à récolter pour une utilisation durant trois mois l’hiver
Concernant l’ensilage de maïs épi, il faut être très rigoureux à la récolte notamment sur la partie du tassage. A la station expérimentale de Trévarez, nous n’avons pas eu de perte à la conservation .
«Avec du maïs épi, il faut un ensilage d’herbe d’excellente qualité »
➧ POUR EN SAVOIR PLUS
➧ Contacts techniques
Elodie Tranvoiz
Chargée d'études - Chambre d'agriculture de Bretagne
elodie.tranvoiz@bretagne.chambagri.fr
Valérie Brocard
Chargée d’études - Institut de l'Elevage