Mettre au point une méthode de phénotypage individuelle à grande échelle de l’Efficience Alimentaire des jeunes bovins (JB) en engraissement, avec des rations contrastées à base d’amidon (maïs) ou de cellulose (herbe)afin de :
Sélectionner sur l’efficience alimentaire est un enjeu important pour les éleveurs bovins allaitants. Pour étudier sa faisabilité, 660 jeunes bovins ont été engraissés dans 4 stations expérimentales, de 2015 à 2019, avec de l’ensilage de maïs ou d’herbe ad libitum. L’efficience de conversion des aliments (EA) était supérieure chez les JB engraissés avec l’ensilage de maïs (0,164 kg/kg MS contre 0,146 kg/kg MS avec l’herbe) lié à des croissances élevées. Une importante variabilité individuelle sur les critères d’efficience est observée, permettant ainsi d’émettre l’hypothèse qu’une sélection génétique sur l’EA est possible. Sur le volet environnemental, les animaux les plus efficients émettent moins de CH4 estimé journalier par rapport aux animaux gaspilleurs.
Des essais en stations expérimentales avec des auges peseuses
Des essais zootechniques d’engraissement de jeunes bovins charolais ont été menés entre 2015 et 2019 dans 4 stations expérimentales. Les animaux ont été phénotypés sur leurs performances et leurs ingestions ont été mesurées à l’aide d’auges peseuses sur deux régimes alimentaires contrastés en amidon et distribués à volonté. Des pesées régulières ont été réalisées sur les animaux tout au long des essais et des mesures ont été effectuées sur les carcasses à l’abattoir.
Deux régimes comparables dans les apports mais contrastés sur leur composition
Les jeunes bovins ont été répartis selon deux régimes alimentaires contrastés sur les parties amidon et cellulose autrement dit un régime basé sur de l’ensilage de maïs pour l’un et sur de l’ensilage d’herbe pour l’autre (figure 1).
Le régime maïs est composé de 65 % d’ensilage de maïs complété avec des céréaleset un complémentaire azoté. Le régime herbe est composé de 60 % d’ensilage d’herbe et la ration est équilibrée avec de la pulpe de betteraves de façon à rester sur un régime avec de l’énergie apportée sous forme de cellulose.
Les rations sont équilibrées de façon à répondre aux objectifs expérimentaux qui ont respecté notamment l’écart du pourcentage d’amidon (33 % pour le régime maïs contre 7 % pour l’herbe).
Une importante variabilité individuelle observée
A l’échelle individuelle, une variabilité individuelle élevée des performances est observée (figure 2). Alors que l’EA de l’ensemble des animaux peut varier de 0,083 à 0,238 kg/kg MS, les croissances varient de 717 à 2 253 g/j. Ce constat se retrouve au sein d’un même lot. De plus, cette variabilité se confirme sur les critères d’efficience exprimés.
Il est noté également que de très bonnes performances sont possibles avec la ration cellulose. En effet, certains animaux nourris avec la ration cellulose ont eu des croissances à plus de 2 000 g/j ainsi que des EA proches de 0,200 kg/kg MS, lorsque l’ensilage d’herbe était de qualité.
L’importante variabilité individuelle observée permet d’émettre l’hypothèse qu’une sélection génétique sur l’EA est possible.
Une meilleure digestibilité qui entraîne plus d’émissions de méthane (CH4)
L’émission de CH4 prédite à partir de la composition chimique des fèces des animaux (MAT et MO) montre une corrélation significative avec le classement des animaux quant à leur consommation moyenne journalière résiduelle (CMJR) autant exprimé en quantité journalière que par unité d’ingestion (kg MS) (figure 3). Le signe de cette relation est différent selon le mode d’expression de l’émission de CH4 utilisé : les animaux les plus efficients (CMJR négative), ayant des ingestions journalières plus faibles, émettent moins de CH4 estimé journalier par rapport aux animaux gaspilleurs (CMJR positive) mais ils émettent davantage lorsque le CH4 est exprimé par rapport à l’ingéré. Il semblerait en effet, qu’une meilleure digestibilité entraîne une meilleure valorisation de l’aliment mais aussi une plus forte production de méthane par unité d’ingestion
Ce projet a permis de phénotyper 660 jeunes bovins sur deux rations contrastées, l’une à base d’ensilage de maïs, l’autre à base d’ensilage d’herbe. En moyenne, les animaux ayant reçu la ration à base de maïs ont montré des croissances plus élevées pour des consommations comparables à celles de l’autre lot. Ils avaient ainsi une meilleure efficience alimentaire exprimée en EA. Cependant, de très bonnes performances ont aussi été observées avec la ration à base d’ensilage d’herbe. Les analyses ont montré de très fortes variabilités individuelles. Les animaux les plus efficients émettent moins de CH4 estimé journalier par rapport aux animaux gaspilleurs mais davantage lorsque le CH4 est exprimé par kg de MS ingéré. La mesure des ingestions individuelles est coûteuse et chronophage. Une étude des déterminismes de l’EA a été réalisée et va se poursuivre afin de dégager de possibles prédicteurs de l’EA (abondance naturelle en 15N, digestibilité de la MO).
Julien Renon - Responsable de la ferme expérimentale de Jalogny
Chambre d'agriculture Saône et Loire
Jérémy Douhay
Institut de l’Élevage
Clément Fossaert
Institut de l’Élevage